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Les promesses de l’intelligence artificielle et de l’E-santé pour les maladies rares

Publié le 28 février 2022
La journée internationale des maladies rares a été célébrée pour la première fois en 2008, le 29 février, une date « rare » qui se produit une fois tous les 4 ans. Depuis cette date, la journée mondiale des maladies rares a lieu tous les ans le dernier jour du mois de février. D’abord c’est quoi une pathologie rare ?
Selon le critère de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) une maladie est dite rare lorsqu’elle touche moins d’1 personne/2000 dans la population générale. Au Maroc, pour une population totale de l’ordre de 34 millions d’habitants (recensement 2014), , la définition s’applique -par un simple calcul mathématique- à toute maladie dont le nombre de personnes vivantes contemporaines ne dépasse pas 17 000.
Plus de 7000 maladies rares sont identifiées, dont plus de 80% sont d’origine génétique. Bien qu’individuellement rares, collectivement, on estime que ces maladies affectent 350 millions de personnes dans le monde.
L’ère du « big data » et de l’E-santé constitue une énorme opportunité pour le progrès de la démarche thérapeutique dans les maladies orphelines, mais pose également d’importants défis en matière de gestion des données et d’éthique. L’intelligence artificielle (IA), pourrait aider à transformer la vie des personnes vivant avec ces conditions difficiles ? Et comment ?

L’IA pour réduire l’errance et l’impasse diagnostique pour les patients

Grâce aux logiciels et plateformes, capables de regrouper les données et l’expertise sur les maladies rares, les prestataires de soins de santé boostent leurs connaissances, et arrivent facilement à accéder, partager et échanger des informations pertinentes.
Outre cette augmentation du savoir et du savoir-faire, un autre facteur important susceptible d’améliorer la situation des patients atteints de maladies rares, notamment, les progrès des technologies de l’information, et l’intelligence artificielle (IA). Bien évidemment, il est pratiquement impossible pour un médecin de mémoriser des informations sur des milliers de maladies rares, par contre la machine peut facilement « stocker » et analyser d’énormes quantités de données « Informations numériques ». La machine peut également extraire et utiliser ces informations de manière significative – par exemple -, en classant les patients en groupes de maladies ou en prédisant les résultats ; cela a un fort potentiel pour améliorer le diagnostic et le traitement et par conséquent, le pronostic.
Des recherches antérieures, ont montré qu’un système-expert d’IA qui calcule les probabilités de maladie en fonction des symptômes du patient peut potentiellement accélérer les diagnostics de maladies rares. Le Pr Tom Lenaerts et son équipe ont développé un algorithme capable d’identifier d’une nouvelle manière les causes génétiques potentielles de maladies rares en prévoyant l’impact de combinaisons des variants génétiques sur le développement de ces maladies. Un autre système, Face2Gene, peut aider les médecins à diagnostiquer des maladies génétiques rares sur la base de photographies de visages de patients.

docteur

Big data et médecine

Big data 

Grâce à la démocratisation du séquençage de l’ADN, les chercheurs annoncent que les nouvelles techniques basées sur un nanopore, pourraient réduire remarquablement les tarifs et les durées du séquençage. Le génome humain comporte des milliards de données. Grâce au big data et aux algorithmes, il serait possible de croiser les données de patients à travers le monde pour tenter d’identifier des gènes modificateurs conférant une certaine protection contre les principales atteintes de maladies rares. Isoler ces gènes permettrait d’élaborer des traitements qui répliquent leurs effets, à destination des patients (génétiquement) les plus menacés. La Fondation 101 Génomes a lancé un premier projet pilote consacré au syndrome de Marfan (une maladie génétique rare).

Le digital et l’approche collaborative 

Le digital et l’intelligence artificielle sont aujourd’hui reconnus comme des facteurs essentiels de renforcement de l’approche collaborative dans le domaine des soins médicaux. Bien évidemment, le domaine de la gestion des maladies rares a aussi profité de ce boost de connectivité, et des réseaux de mise en relation d’experts ont été créés. Il s’agit notamment, des  réseaux européens de référence ERN, qui fournissent une infrastructure informatique permettant aux professionnels de santé de collaborer sur des panels virtuels pour échanger des connaissances et décider des traitements optimaux ; et le programme conjoint européen sur les maladies rares (EJP maladies rares), une coopération multinationale ayant comme objectif de créer un écosystème facilitant la recherche, les soins et l’innovation médicale dans le domaine des maladies rares. Aux États-Unis, l’Undiagnosed Diseases Network (UDN) rassemble des experts qui collaborent pour diagnostiquer et traiter les patients atteints de maladies rares. Et en Allemagne, ils ont lancé une initiative nationale, Digital Collaboration on Rare Diseases (CORD-MI), visant à améliorer la documentation et l’échange de données sur les maladies rares dans les hôpitaux universitaires allemands.
L’e-santé apparaît de plus en plus comme une solution pertinente pour répondre aux nombreuses attentes des personnes et des familles d’enfants atteints de pathologies rares.  D’ailleurs, la majorité des problèmes évoqués par les parents d’enfants atteints de maladies rares pourraient être facilement résolus par l’introduction du numérique et de l’intelligence artificielle dans le processus de soins.  Il s’agit en particuliers, des problèmes liés au délai du diagnostic, la multiplication des consultations avant l’identification d’un diagnostic, le manque d’information de la part du médecin sur la maladie de l’enfant, l’absence et le délai d’accès à un spécialiste, le manque de soutien psychosocial et le manque d’information pour accompagner le patient ou la famille.

Dr GHANIMI Rajae

Médecin spécialiste en médecine du travail

Présidente fondatrice de l’association Hippocrate DS

Doctorante et chercheuse en IA appliquée à la médecine, auteur de plusieurs articles sur la transformation digitale en santé.